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Extraits de mon livre Glisser une main entre les jambes du destin (Asinamali, 2ème éditions, 2019). Photos de Kuniyoshi Kaneko.

 

 

Si je ne partais de la volonté de garder une ouverture sur l’impossible, je n’aurais rien pour quoi vivre, rien à préserver par principe, dans ce rapport au monde que je définis amour.
L’impossible n’est pas l’inconnu. L’impossible est le connu poussé à de tels extrêmes dans l’expérience humaine qu’il dispute de vastes territoires à la mort. Du reste, la réalité du monde évolue seulement si l’idée que nous en avons et qui nous lie aux lieux habituels de la pensée se brise, encore et encore.
Le chemin qui nous mène à l’impossible [peut-il exister floraison plus joliment nommée ?] est déjà implicite dans l’expérience même du corps, des différents corps que nous endossons, à travers les orifices qui nous exposent, qui nous rendent réceptifs, communicants, expulsifs.
Le corps serait sur le point de finir ? L’amour serait ainsi destiné à périr pour s’être contemplé trop longtemps dans le miroir, à l’instar de Dieu qui se perdit dans les yeux strabiques de ses créatures ? (…)

 

 

Abandonnez la médiocrité. Ne soyez rien. Soyez un rien qui invagine le sommet en éludant les vides. Il faut fourrer ses doigts dans la gorge de la société, lui faire vomir tout le pouvoir figé. On ne pose pas de point d’interrogation devant le corps sans que la question devienne chair. Le corps restera toujours un affront à toute sentence.
L’acte de se soulever. De te soulever. De te prendre par la main. Et me manifester à tes côtés. Contre toi. Pour ne pas me vautrer dans des idées réchauffées.
Obstination joyeuse. Pour découvrir des projets, inventer des lieux. Dans un au-delà qui ne sera jamais outrage. Je te soulage de tes humeurs. Je m’y débats. Je t’aime. Je me bats pour toi. Et je continue de changer l’eau de la pensée que j’ai de toi. Fleurs de salive sur le mur de chair qui sera la mort. Je me débats, je te mets à exécution. Tu t’insurges. Tu te lèves sur ta peau. Comme le soleil qui s’élance vers le jour. Tu t’insurges, tu t’écoules et sévis. Toi, feu liquide, clause immense de ma nouvelle chair. En avance sur la vie, je me débats en toi, je trébuche avec toi. Je crie. D’un cri qui s’empare de toute voix. Toi seule m’entends, toi seule. Je veux plus de destin, encore plus de puissance. Prends-moi par la main. Reste avec moi. La soirée est fraîche. Cherchons-nous une brèche. Nous y sommes presque désormais, nous y sommes presque…